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Amblyopie (2007) - Acuité visuelle, cortex visuel primaire et secondaire, champ récepteur


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Amblyopie, acuité visuelle et cerveau (cortex visuel).


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Introduction


Il est un court raccourci de dire que l’œil est un appareil optique permettant la focalisation de l’image sur la rétine. C’est alors que le traitement sensoriel de l’information commence. Si l’intégration du message visuel débute au niveau rétinien, c’est au niveau cérébral que s’élabore la perception. Et quand bien même, le cortex visuel n’est qu’un premier relais de perception, distribuant son information vers les parties antérieures du cerveau (voie ventrale et voie dorsale) : cortex frontal et temporal, aires associatives.
Pour résumer la physiologie visuelle, on peut dire que l’image visuelle est un stimulus sensoriel chargé d’information qui sera capté par un récepteur, puis transmise à un décodeur et à un intégrateur. C’est ainsi que l’information prend sens. Le message visuel est composé de lumière, c’est-à-dire d’une radiation électromagnétique (onde/photon). La lumière visible, c’est-à-dire qui est captée par les photorécepteurs, va de 400 à 700 nm de longueur d’onde. Le stimulus a donc une longueur d’onde, une intensité lumineuse, mais aussi un contraste, un mouvement.
Dès l’étage rétinien, il existe une intégration du message visuel, ce qui permet un premier codage d’une information traitée par 100 millions de récepteurs (photorécepteurs) et transmise par 1 million de transmetteurs (axones des cellules ganglionnaires). Il existe un premier traitement de l’information au niveau de la rétine, des photorécepteurs aux cellules bipolaires. Les afférences synaptiques entre les photorécepteurs et les cellules bipolaires se font par deux voies : directe et indirecte, correspondant à une opposition centre/périphérie, avec ainsi des champs récepteurs centre ON/périphérie OFF ou l’inverse. Le second traitement de l’information au niveau de la rétine se fait des cellules bipolaires aux cellules ganglionnaires. Le message est transmis des cellules bipolaires aux cellules ganglionnaires qui présentent la même organisation ON/OFF ou OFF/ON. Il existe différents types de cellules ganglionnaires. On trouve trois types de cellules ganglionnaires dans la rétine du chat (selon la taille du corps cellulaire et des arborisations dendritiques) : α, β et γ. Chez le macaque (comme chez l’homme), on trouve de grandes cellules de type M (magnus) et de petites cellules de type P (parvus). Elles correspondent à deux voies :
  • Voie M, pour laquelle les champs récepteurs sont grands et pour laquelle les cellules traitent des informations de faible contraste et participent à la détection du mouvement.
  • Voie P, pour laquelle les champs récepteurs sont petits, et pour laquelle les cellules traitent des informations colorées, de la forme et des détails.

Au niveau du corps géniculé latéral dorsal, il existe une ségrégation en couches séparées des afférences en provenance de chaque œil et une conservation de la rétinotopie.
Au niveau du cortex visuel primaire, les cellules présentent des propriétés de dominance oculaire (couche IV), de binocularité (couche II/III), de sélectivité à l’orientation, à la vitesse…
Au-delà, les cortex visuels secondaires participent à l’intégration d’un message perceptif de plus en plus élaboré.
Le corps calleux est impliqué dans la perception du méridien vertical central, la vision stéréoscopique, la réunion des deux hémichamps visuels.
Il existe une poursuite du développement des structures oculaires, des voies visuelles, des structures cérébrales impliquées dans la perception visuelle après la naissance. C’est pourquoi une altération précoce de l’expérience visuelle, du fait d’une altération de ce processus de développement et du fait de la plasticité cérébrale, est à risque d’amblyopie.
La vision est une fonction complexe dont la connaissance de la physiologie est facilitée par la possibilité d’accès au récepteur (œil) que l’on peut stimuler aisément et à l’intégrateur « principal » (cortex occipital). Mais la connaissance de la physiologie visuelle précise est difficile car l’analyse est souvent parcellaire, les stimuli expérimentaux évalués bien pauvres par rapport à la complexité d’une image réelle. Les zones à étudier sont par ailleurs multiples (la moitié du cortex est consacré à l’intégration corticale du message visuel).
Dans cet article seront rappelés les fondements neurophysiologiques essentiels de la vision, au niveau du corps géniculé latéral dorsal, du cortex visuel primaire et des cortex visuels secondaires, ainsi que du corps calleux. Enfin seront rappelées les bases neurales de l’amblyopie.

Les fonctions visuelles


La mesure de l‘acuité visuelle est une mesure psychophysique. Elle traduit l’angle minimum de résolution entre deux lignes. Définissons- la fréquence spatiale comme le nombre de cycles par degré d’angle visuel. La mesure de l’acuité visuelle est la recherche de la plus haute fréquence spatiale visible à contraste égal à 1. L’acuité visuelle maximale est de 60 cycles par degré, soit 30 secondes d’arc, correspondant à 0,3 unité logarithmique, soit 20/10.
La mesure de l’acuité visuelle n’est qu’un élément de la fonction visuelle, celle-ci étant multiple : fonction de sensibilité au contraste, vision stéréoscopique, vision des couleurs, champ visuel, vision du mouvement…

Comment étudier le cerveau ?


Les travaux fondamentaux permettant de décrypter la neurophysiologie visuelle reposent sur des approches anatomiques ou fonctionnelles.
Les approches anatomiques reposent sur l’étude de coupes de cerveaux, après divers marquages, colorations, étude des réseaux neuronaux.
Les approches fonctionnelles reposent sur l’électrophysiologie (travaux premiers de Hubel et Wiesel). Chez un mammifère supérieur (furet, chat, singe…) anesthésié et paralysé, un enregistrement électrophysiologique par micro-électrode en tungstène introduite dans le cortex ou la zone d’intérêt est effectué lors d’une stimulation visuelle. En fonction de la localisation du stimulus dans le champ visuel et la localisation de l’électrode, les paramètres rétinotopiques peuvent être retrouvés. Les propriétés des neurones sont étudiées : dominance oculaire (selon la réponse à la stimulation d’un œil ou de l’autre), sélectivité à l’orientation (selon la réponse à un stimulus se déplaçant dans un sens défini), binocularité…
Plus récemment s’est développée une approche fonctionnelle par imagerie optique : enregistrement des propriétés différentielles de réflectivité optique de l’hémoglobine directement au niveau du cortex, selon l’activité ou non de la zone étudiée, en fonction de la stimulation visuelle.

Notion de champ récepteur


Le champ récepteur d’une cellule du système visuel (quel que soit l’étage étudié) peut être défini comme la région de la rétine au niveau de laquelle une variation de la stimulation lumineuse (stimulus positif ou négatif) entraîne une modification du potentiel membranaire de la cellule.

Le corps géniculé latéral dorsal


Le corps géniculé latéral dorsal (CGLd) est une structure thalamique qui reçoit 90 % des projections rétiniennes, 10 % allant au colliculus supérieur ou tectum optique. Le CGLd comporte six couches de corps cellulaires qui sont séparées par des couches ne comportant que des axones et des dendrites. L’analyse histologique montre que les deux couches ventrales comportent des neurones dont le corps cellulaire est de taille relativement grande : il s’agit des couches magnocellulaires. Leurs afférences proviennent des cellules ganglionnaires de la rétine dite M. Les quatre couches dorsales sont nommées parvocellulaires car les corps cellulaires de leurs neurones sont de petite taille. Ils reçoivent leurs afférences des cellules ganglionnaires de type P.
Il existe une séparation des voies M, P et K. La voie koniocellulaire correspond aux cellules non M non P de la rétine qui projettent sur des cellules du CGLd à la face ventrale des couches M et P.
Est conservée une rétinotopie au niveau du CGLd.
Les deux ensembles de cellules magnocellulaires et parvocellulaires comportent des neurones dont les champs récepteurs ont des propriétés concentriques centre ON/périphérie OFF (ou l’inverse), comme les cellules ganglionnaires de la rétine qui projettent sur elles.
La ségrégation œil droit/œil gauche demeure. Du fait de la décussation chiasmatique, une couche donnée du CGLd reçoit ses afférences uniquement de la rétine ipsilatérale (champ rétinien temporal) ou controlatérale (champ rétinien nasal). Le CGLd d’un hémisphère reçoit les informations de la moitié opposée du champ visuel : hémichamp visuel droit pour le CGLd gauche et hémichamp visuel gauche pour le CGLd droit.
De même que les cellules ganglionnaires, les neurones P et M pos-sèdent des propriétés différentes. La principale propriété différentielle est celle de la sensibilité différente au contraste de couleur. Les neurones P du CGLd répondent de manière opposée à la stimulation des cônes par une lumière bleue ou par une lumière jaune ou bien par un couple de lumière rouge ou verte. Ils sont donc sensibles aux changements de couleurs (rouge/vert et bleu/jaune) et peu aux changements de luminance des couleurs. En revanche, les neurones M répondent faiblement aux changements de couleur, mais sont très sensibles aux contrastes de luminance entre la partie sombre et la partie brillante du stimulus. Dès l’étage du CGLd se dessine une propriété fondamentale des neurones visuels : la vision du contour est suffisante à la vision de l’objet.

Cortex visuel primaire


Le cortex visuel primaire est la zone corticale qui reçoit des afférences directes du CGLd. Il s’agit chez l’humain de l’aire V1 ou aire 17 de Brodmann. Elle est située dans la partie postérieure du cerveau (cortex occipital). Chez le chat en revanche, à la fois les aires 17 et 18 sont primaires car recevant des afférences directes du CGLd. L’aire V1 de chaque hémisphère reçoit des informations du champ visuel controlatéral. Il existe cependant une double projection de la zone du méridien vertical central. La rétinotopie est conservée avec une amplification maculaire considérable, puisque la moitié de la surface de V1 correspond aux projections en provenance de la fovéa. Le cortex primaire est épais de 2 mm chez l’humain. Les colorations histologiques (Nissl ou cytochrome oxydase) permettent de distinguer six couches de neurones (substance grise) entre la surface et la substance blanche sous jacente (composée des axones myélinisés). Les afférences du CGLd se projettent principalement dans la couche IV qui se sous-divise en 4 sous couches : IVA, IVB, IVCα sur laquelle se projettent les cellules M du CGLd et IVCβ sur laquelle se pro-jettent les cellules P du CGLd. Il existe des connexions intracorticales multiples, horizontales et verticales et, de même qu’il reçoit des afférences, le cortex strié émet de nombreuses efférences, vers les cortex secondaires, vers l’autre hémisphère via le corps calleux, mais aussi vers le CGLd.
Il existe différents types de neurones au niveau du cortex visuel. Deux principaux types de neurones sont à définir. Les grandes cellules pyramidales sont des neurones excitateurs de projection vers d’autres régions cérébrales. Les cellules étoilées sont soit lisses et correspondant à des interneurones locaux inhibiteurs soit à épines et correspondants à des interneurones excitateurs. Les informations visuelles en provenance du CGLd projettent d’abord aux interneurones étoilés à épines dans la couche IV. Elles projettent ensuite verticalement vers les autres couches corticales. Au niveau de la couche IV, les champs récepteurs des neurones sont semblables à ceux du CGLd (centre ON ou OFF).
Au niveau des autres couches, en particulier II/III, on retrouve des champs récepteurs différents, et une réponse des cellules de façon préférentielle à des stimulations ayant des propriétés linéaires comme une ligne ou une barre. On distingue les neurones simples des neurones complexes. Les neurones simples répondent préférentiellement à une barre de lumière qui possède une orientation spécifique. Ainsi, une cellule qui répond le mieux à une barre verticale ne répondra pas à une barre horizontale ou même oblique. Les champs récepteurs des cellules simples possèdent des régions excitatrices et des régions inhibitrices qui sont parallèles les unes avec les autres. Les régions ON excitatrices des champs récepteurs reçoivent leurs afférences de cellules centre ON du CGLd et in-ver-sement les régions OFF reçoivent les projections de cellules centre OFF du CGLd. Les neurones complexes ont des champs récepteurs plus larges que ceux des neurones simples. Ils sont également sélectifs pour l’orientation, mais la position précise du stimulus à l’intérieur du champ récepteur est moins cruciale, car il n’existe pas de zones ON ou OFF bien délimitées. C’est pourquoi un mouvement du stimulus au travers du champ récepteur représente un stimulus efficace pour certains neurones complexes. Les propriétés des neu-rones complexes sont telles qu’elles paraissent utiles à la détection des contours des objets. En fait l’information contour peut-être suffisante pour reconnaître un objet.
Il existe au niveau de la couche II/III des cellules qui ont une propriété de binocularité. Hubel et Wiesel ont défini la propriété de binocularité en 7 classes :
  • Classe 1 (réponse exclusive à la stimulation controlatérale) ;
  • Classe 2 (fort biais de réponse à la stimulation controlatérale) ;
  • Classe 3 (faible biais de réponse à la stimulation controlatérale) ;
  • Classe 4 (réponse maximale à la stimulation des deux yeux) ;
  • Classe 5 (faible biais de réponse à la stimulation ipsilatérale) ;
  • Classe 6 (fort biais de réponse à la stimulation ipsilatérale)
  • Classe 7 (réponse exclusive à la stimulation ipsilatérale).

Ces cellules sont sensibles à la disparité rétinienne et sont impliquées dans la vision stéréoscopique.
Le cortex visuel primaire est organisé en modules fonctionnels. Les neurones dont les champs récepteurs sont semblables sont organisés en colonnes. Chaque colonne est large de 30 à 100 µm, profonde de 2 mm. Les champs récepteurs sont concentriques dans la couche IV. Dans les autres couches corticales on retrouve les neurones à champ récepteur simple qui reçoivent des informations en provenance de la même région rétinienne et dont la propriété fondamentale est la sélectivité à l’orientation. Les colonnes d’orientation ainsi définies comportent également des neurones complexes. Toutes les orientations sont représentées et pour une même région du champ visuel, on retrouve les différentes orientations codées, de 10° en 10°, avec un cycle de 180° répété tous les ¾ de millimètre. Ceci a été mis en évidence par l’expérimentation électrophysiologique couplée à des colorations histologiques et à partir des années 1 990 par l’imagerie optique.
On retrouve d’autres propriétés fondamentales des neurones visuels, comme la sélectivité de direction des cellules de la couche IVβ (canal M). D’autres cellules sont sensibles à la vitesse. Toutes ces propriétés sont superposées et on peut définir des cartes corticales fonctionnelles.
Il existe un autre système d’alternance de colonnes en plus des deux précédents, qui correspond à la séparation des afférences en provenance des deux yeux. Ce sont les colonnes de dominance oculaire visualisées par étude histologique du cerveau après injection intravitréenne d’un acide aminé radioactif injecté dans un œil, transporté par voie axonale et transsynaptique, et entraînant un aspect zébré du cortex visuel.
Le décalage systématique des axes des colonnes d’orientation est inter-rom-pu en différents endroits par des amas de neurones (« blobs »), présents dans les couches corticales II et III. Ces amas sont visibles sous forme de taches sombres sur une coupe de 40 µm d’épaisseur (l’histochimie révèle la densité en cytochrome oxydase, une enzyme mitochondriale qui dénote une forte activité mé-ta-bo-lique) et sont associés à la vision des couleurs car ils comportent des neurones qui sont sensibles aux contrastes de couleurs.
Hubel et Wiesel, prix Nobel de physiologie et médecine en 1 981, ont proposé le terme d’hypercolonne pour dénommer la région qui regroupe toutes les colonnes d’orientations d’une région particulière de l’espace visuel. Une séquence complète de colonnes de dominance oculaire et de colonnes d’orientation se répète en effet régulièrement et précisément sur toute la surface du cortex visuel primaire, chacune occupant une région d’environ 1 millimètre carré. Cette disposition systématiquement répétée comme une pixelisation correspond à l’organisation fonctionnelle modulaire du cortex visuel. L’intégration et l’analyse des dif-fé-rentes propriétés de chaque « pixel » : orientation, classes de binocularité, couleur, mouvement, permet de percevoir finalement l’image.

Cortex visuels secondaires


Au-delà de V1, on retrouve plus de 20 aires corticales contribuant à l’intégration du message visuel. Les données précises restent floues, mais certains points sont à souligner. Depuis le cortex occipital l’information visuelle chemine par deux voies :
  • Voie ventrale avec en particulier l’aire V4 participant à la perception de la couleur et l’aire ITT (cortex inféro-temporal) participant à la reconnaissance des visages.
  • Voie dorsale avec l’aire V5 ou MT (lobe temporal moyen) et participant à la perception du mouvement.

Corps calleux


Les deux hémisphères du cerveau des mammifères, bien qu’anatomiquement séparés, coopèrent l’un avec l’autre par l’intermédiaire de faisceaux de fibres qui constituent les commissures cérébrales. Parmi celles-ci, le corps calleux est la plus importante, du moins par son nombre- de fibres (200 à 800 millions suivant les espèces).
Pont entre les deux cerveaux, et entre les deux cortex visuels, dans chacun desquels est représenté un hémichamp visuel, le corps calleux est impliqué dans la fusion des deux hémichamps visuels, et du méridien vertical central au niveau duquel se trouve la fovéa, représentée é-ga-lement dans les deux cortex. En effet, le système visuel des mam-mi-fères supérieurs est organisé de telle façon que chaque moitié (droite et gauche-) du champ visuel est représentée dans l’hémisphère controlatéral et que le corps calleux participe activement à la fusion perceptive des deux hémichamps visuels par l’intermédiaire de connexions interhémisphériques réciproques. Le corps calleux est impliqué dans la fusion des deux hémichamps représentés chacun dans un hémisphère. Les neurones calleux sont étudiés par des expérimentations sur des mo-dèles avec chiasmotomie, afin que la stimulation d’un œil avec étude de l’hémisphère controlatéral ne corresponde qu’à l’étude de l’information passée par la voie calleuse (et non par la voie croisée rétino-géniculo -corticale). Ils présentent comme les neurones visuels du cortex primaire des propriétés de binocularité, de sélectivité à l’orientation, de sélectivité à la vitesse. Il existe par ailleurs une rétinotopie calleuse.

Amblyopie et période sensible du développement visuel


Comment la mécanique visuelle est-elle modifiée en cas d’expérience visuelle anormale ?
En physiologie normale sont définies, tel que décrit plus haut, les propriétés fondamentales des neurones visuels. Une modification de ces propriétés par une altération de l’expérience visuelle (nous retrouvons encore Hubel et Wiesel qui ont procédé à des enregistrements de l’activité multi-unitaire dans le cortex visuel, chez le chat normal, à différents âges de vie, puis après altération précoce de l’expérience visuelle telle que l’occlusion monoculaire ou le strabisme) a conduit à la connaissance des bases neurales de l’amblyopie Il a été par ailleurs défini la période sensible ou critique du développement visuel (« Period- of susceptibility », « Sensitive period », « Critical period »), pour plusieurs raisons :
  • Existence d’un profil de développement des propriétés neuronales, jusqu’au profil adulte ;
  • Les modifications des propriétés neuronales par une altération de l’expérience visuelle sont différentes en fonction de l’âge et il n’y a pas de modifications au-delà d’un certain âge ;
  • Ces altérations sont réversibles avant un certain âge. Cette ap-proche fondamentale est tout à fait parallèle à l’expérience clinique : profil de développement des fonctions visuelles, amblyopie par altération de l’expérience visuelle précoce, possibilité de traitement de l’amblyopie jusqu’à un certain âge.

S’il existe des éléments montrant que rétine et nerf optique pour-suivent une maturation en post-natal, il n’a pas été montré de modifications structurelles en cas d’amblyopie.
En ce qui concerne le corps géniculé latéral dorsal, les travaux histologiques ont montré une maturation postnatale : disparition des synapses exubérantes chez le singe à 3 mois, profil adulte des terminaisons géniculées atteint à 5 à 6 semaines chez le chat. En ce qui concerne le cortex visuel, l’étude de la propriété de sélectivité à l’orientation des neurones visuels montre que celle-ci n’est pas mature à la naissance. Chez le chat, le profil adulte est atteint, selon les études, entre 1 et 3 mois… En ce qui concerne le corps calleux, les travaux d’électrophysiologie visuelle chez le chat montrent que, si la localisation des neurones calleux est bien à la bordure entre les aires 17 et 18 au 12e jour, comme chez l’adulte, les caractéristiques fonctionnelles (champs récepteurs, sélectivité à l’orientation) sont immatures jusqu’à la 9e semaine environ.
Après altération de l’expérience visuelle, on retrouve une modification des propriétés électrophysiologiques des neurones du CGLd, dont la chronologie est variable selon les études, les animaux, le modèle expérimental (occlusion, strabisme). De même pour les propriétés fondamentales des neurones visuels, il a été montré une perte de la binocularité, une perte de la sélectivité à l’orientation après altération de l’expérience visuelle, mais selon des profils chronologiques variables, et une période sensible du développement visuel chez le chat variant entre 1 et 6 mois. Un élément intéressant a été montré par Da (1 992) qui étudie la dominance oculaire : la période sensible serait plus longue pour les cellules de II/III par rapport à celles de IV. Les caractéristiques anatomo-fonctionnelles des neurones calleux sont altérées après strabisme convergent unilatéral précoce. Enfin, plusieurs études ont montré la réversibilité des altérations fonctionnelles neuronales après rétablissement d’une expérience visuelle normale (prismation mise puis enlevée) chez le chat, le singe, le furet.
Les bases neurales de l’amblyopie sont fondées sur la modification des caractéristiques anatomo-fonctionnelles des neurones visuels en cas d’altération de l’expérience visuelle précocement. L’amblyopie peut être réversible si les altérations ne sont pas fixées (synapse non fonctionnelle mais présente). En revanche, une amblyopie sévère fixée peut schématiquement correspondre au plan neural à l’établissement de connexions anormales et aberrantes.
La question de la notion de période sensible du développement visuel montre une multiplicité, en fait selon les définitions et les expérimentations. La chronologie du développement visuel est précise mais il est difficile d’en faire la synthèse précise. Il peut être souligné que la période sensible du développement visuel est d’autant plus longue que la cellule étudiée est complexe (plus on s’éloigne de l’œil, plus la période sensible est longue). Le profil de la période sensible est lui bien connue, avec une courbe en dôme.
Rappelons enfin que la maturation neuronale normale comme anormale repose sur des cascades moléculaires avec intervention de gènes du développement, de phénomènes de synchronisation entre assemblées de neurones.

Conclusion


La vision est un phénomène hautement complexe évalué au plan clinique par des moyens rudimentaires en comparaison de l’ensemble d’information qu’une vision normale exploite en conditions réelles. Parallèlement, la connaissance fondamentale du substratum neurophysiologique, au moyen d’une recherche profuse, est cependant parcellaire car la synthèse est difficile entre l’addition de propriétés fondamentales bien connues comme la sélectivité à l’orientation ou à la vitesse des neurones visuels et la vraie vision qui analyse simultanément des informations visuelles excessivement nombreuses.
De la rétine au cortex visuel primaire via le corps géniculé latéral dorsal, jusqu’aux cortex visuels secondaires et associatifs, avec é-ga-lement le concours du corps calleux qui relie les deux hémisphères, la mécanique visuelle demeure une entité dont la connaissance précise reste à établir.

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Date de création de la page : mai 2010

Date de révision de la page : Mardi, 24 Mars 2015