Réfraction de l'Enfant : Autoréfractométrie Monique Cordonnier

Introduction


Si la skiascopie représente l’examen diagnostique de base, elle pose comme problème important, la nécessité d’opérateurs entraînés et d’une gestion de temps difficilement compatibles avec la réalisation du dépistage à grande échelle. Les autoréfractomètres sont apparus être une solution de rechange d’un grand intérêt. Toutefois les appareils fixes classiques ont une utilisation difficilement applicable au tout jeune enfant et c’est donc avec le développement des appareils portables que cette technique est devenue routinière.

Généralités


Les principes


  • Les réfracteurs automatiques objectifs se basent pour leurs mesures sur le principe de l’optomètre et sur celui de Scheiner. Ils utilisent généralement la lumière infrarouge qui est invisible pour le sujet examiné et au moins pour ce motif ne sollicite donc pas l’accommodation.
  • Le principe de l’optomètre se rapproche de celui de la rétinoscopie, mais au lieu d’utiliser des lentilles de puissances différentes en maintenant fixe la distance d’examen comme dans la rétinoscopie, l’optomètre utilise une lentille d’une puissance constante placée devant l’œil du sujet à une distance équivalente à la distance focale de la lentille, et c’est en déplaçant la cible lumineuse derrière la lentille que l’optomètre détermine le point de neutralisation des rayons émergents de l’œil, le déplacement nécessaire changeant selon que celui-ci est myope, emmétrope ou hypermétrope. La cible peut consister en une fente lumineuse, la recherche du point de neutralisation pouvant se faire selon des méridiens différents pour mesurer l’astigmatisme.
  • Le principe de Scheiner se base sur le fait que lorsqu’une cible lumineuse envoie un rayon lumineux qui passe avant d’atteindre l’œil par un écran opaque percé de deux petits trous, il est divisé en deux fins faisceaux qui atteignent la rétine. Si l’œil est myope, les deux faisceaux vont se croiser avant d’atteindre la rétine et deux points lumineux seront perçus ; de même, si l’œil est hypermétrope, les deux faisceaux lumineux atteindront la rétine avant de se croiser et deux points lumineux seront perçus. Ce n’est que si l’œil est emmétrope que les deux faisceaux se croiseront sur la rétine, ne formant qu’une image unique. En faisant varier la distance entre l’œil amétrope et la cible lumineuse (par des moyens optiques ou par un déplacement réel de cette cible), on peut déterminer celle qui rend l’image unique, cette variable étant directement liée à l’importance de l’amétropie. Encore une fois, ce test peut être pratiqué selon différents méridiens pour mesurer l’astigmatisme.

Inconvénients


L’étude de la réfraction selon le principe de Scheiner implique un alignement rigoureux de l’œil avec l’appareil de mesure puisque deux fins faisceaux doivent pénétrer par la pupille. Le sujet doit donc rester immobile pendant l’examen. Ceci est une contrainte pour les jeunes enfants turbulents. Ces appareils sont souvent assez massifs et impersonnels, ils nécessitent une contention de la tête et une distance d’examen très proche ce qui effraie les enfants en dessous de deux ans et demi. Comme la lumière infrarouge ne se reflète pas exactement sur le plan de la rétine comme la lumière visible mais un peu plus en arrière, il existe des différences de réfraction atteignant 0,75 à 1,50 dioptrie, ce qui fait que ces appareils doivent être calibrés en usine en comparant leurs résultats avec ceux obtenus par les méthodes conventionnelles.
Même si la lumière infrarouge ne sollicite pas l’accommodation, celle-ci entre quand même en jeu lors des mesures sans cycloplégie car le sujet fixe une cible. Les fabricants ont tenté de minimiser celle-ci en focalisant la cible à l’infini et en pratiquant une méthode de brouillage de la cible.

Avantages


Les mesures sont rapides, de l’ordre des secondes ce qui est évidemment loin d’être le cas des rétinoscopies qui demandent des minutes (en réalité la skiascopie du tout jeune enfant nécessite plutôt une succession d’examens brefs). Le diamètre pupillaire requis pour permettre les mesures est peu contraignant (environ 2,5 à 3 mm). L’opérateur est informé indirectement de la présence d’opacités des milieux par l’impossibilité de prendre des mesures. Il peut aussi en être le témoin direct car l’image de l’œil filmé par une caméra sur l’écran vidéo a en général une très bonne définition et les opacités de milieux sont souvent visibles si elles appartiennent au segment antérieur.
Dans l’ensemble, leurs performances sont très satisfaisantes, comparables voire supérieures aux résultats obtenus avec de bonnes rétinoscopies, c’est-à-dire des rétinoscopies avec des patients coopérants ayant des pupilles de diamètre suffisant et des milieux transparents (Guyton [6], Wood [9]). La variabilité des mesures que l’on obtient lorsque l’œil examiné n’est pas cycloplégié n’est pas inhérente à l’appareil si les mesures sont prises successivement au cours d’une courte séquence mais bien à l’acte accommodatif qui peut entraîner une variabilité sphérique et cylindrique (Rubin [7]). La reproductibilité de leurs mesures sous cycloplégie est excellente (±0,5 ∂), en général supérieure à celle de la rétinoscopie (±1 ∂) (Zadnik [10]).

Les appareils portables


Le Rétinomax


Le premier réfractomètre automatique portable (de fabrication japonaise, Nikon) apparu sur le marché est le Rétinomax (1 995). Il permet de prendre des mesures réfractives à tout âge, surtout si le mode Quick est utilisé.
Par rapport aux réfractomètres classiques sur table, cet appareil comporte trois avantages majeurs :
  • Le fait qu’il soit conçu pour être tenu à bout de bras, ce qui autorise un usage ambulatoire.
  • Le fait qu’il soit compact et ne nécessite pas de contention de la tête, permettant de ne pas apeurer l’enfant.
  • Le fait qu’il prenne très rapidement les mesures, ce qui facilite l’examen des enfants turbulents.

Fonctionnement de l’appareil


Le mode d’emploi stipule que les principes optiques sur lesquels se basent les mesures sont analogues à ceux de l’autoréfractomètre NIKON NR-1000 F : utilisation de la lumière infrarouge, investigation de tous les méridiens sur 360° selon les principes de Scheiner pour la détection et rétinoscopie selon les principes de l’optomètre. Toutefois, l’optomètre ne se base pas ici sur la recherche du point de neutralisation pour faire ses mesures, mais bien sûr la vitesse de mouvement des rayons émergents. L’appareil est équipé d’une caméra sensible à la lumière infrarouge et d’un petit écran qui permet à l’opérateur de visualiser l’œil examiné et de vérifier son alignement avec l’appareil grâce à des mires et au reflet cornéen. Il n’y a qu’un bouton à actionner pour débuter la prise des mesures et les manipulations sont donc très réduites. L’appareil est capable de mesurer les sphères de -18/+23 dioptries et les cylindres jusqu’à 12 dioptries. Le diamètre pupillaire minimum requis est de 2,5 mm.

Deux modes de mesure


  • Le mode « Normal  »
    Il se met spontanément en route si la touche Quick n’est pas actionnée. Il enclenche une méthode de brouillage automatique de la cible après alignement de l’œil avec l’appareil, puis une prise de mesure. Le but est de minimiser l’accommodation et donc la myopie instrumentale.
  • Le mode « Quick  »
    Il n’enclenche pas ce brouillage automatique et est donc beaucoup plus rapide car la prise de mesure est immédiate. Le constructeur conseille d’utiliser le mode normal, sauf si les yeux bougent beaucoup, car dans ces conditions, à peine l’alignement est-il réalisé et le mode de brouillage enclenché qu’un nouveau mouvement de l’œil annule la prise de mesure, et le cycle du brouillage automatique est à recommencer. Dans ces cas, le mode Quick peut être utilisé, mais le constructeur met en garde concernant le fait que les mesures peuvent, à ce moment, être très variables et de moindre fiabilité. La prise d’une mesure nécessite 0,14 à 0,07 seconde, et s’affiche en 0,2 sec.

Il faut environ 10 secondes pour avoir les 16 mesures des deux yeux en mode Quick. En mode normal, il faut au moins 15 secondes, parfois plus si l’alignement n’est pas satisfaisant, et il arrive que la prise de mesures dans ce mode soit impossible si l’enfant n’est pas suffisamment calme.

Quick ou Normal ?


Nous avons testé ces deux modes pour voir s’il y avait une réelle atténuation de l’accommodation en mode normal (Cordonnier et al [2,3 & 4]). Chez 93 enfants choisis au hasard, nous avons pratiqué au même moment une réfraction manifeste selon le mode Normal et une autre selon le mode Quick (qui s’accompagne automatiquement d’une musique attractive pour l’enfant).
Le mode normal rend les mesures plus longues et plus difficiles et parfois impossibles chez les jeunes enfants remuants (si un alignement correct n’est pas obtenu pendant suffisamment longtemps pour prendre les mesures) ; les mesures en mode Quick sont beaucoup plus rapides à obtenir ce qui rend l’examen quasi toujours réalisable dans nos mains. Toutefois, si le mode normal permettait réellement une atténuation de l’accommodation, cela justifierait de préférer celui-ci au mode Quick pour éviter la myopie instrumentale. Une atténuation de l’accommodation en mode normal devrait conduire à des mesures de sphère relativement plus positives et des mesures de cylindre moins négatives. Or, la comparaison des deux modes de mesure manifeste, n’a révélé de différence significative ni pour les sphères ni pour les cylindres et la différence moyenne est dans les deux cas très proche de zéro. L’argument d’une minimisation de l’accommodation en mode normal n’est donc pas prouvé.
En conclusion, nous suggérons l’emploi du mode Quick pour les bébés et les très jeunes enfants, aussi bien sans qu’avec cycloplégie.

Critiques concernant le Rétinomax


  • Surévaluation de l’astigmatisme en présence d’une amétropie forte ([1&3]) : c’est un problème lorsqu’il s’agit de prescrire des lunettes aux tout petits enfants, auquel cas il vaut mieux se fier à l’équivalent sphérique ou réduire de moitié la prescription d’astigmatisme.
  • Mesures non simultanées aux deux yeux : ceci peut augmenter le risque de fausses amétropies lors des mesures en mode manifeste.
  • Erreurs de latéralisation : il faut être très attentif lors des mesures car l’appareil latéralise parfois l’œil de façon erronée si le visage de l’enfant est très menu. Il y a toutefois moyen de pallier cet inconvénient en choisissant manuellement sur l’appareil l’œil à tester.
  • Imprécision concernant l’axe de l’astigmatisme : comme l’appareil n’est pas stable, il suffit que l’examinateur l’incline un peu lors de l’examen pour faire varier l’axe d’astigmatisme. Lorsqu’on prend des mesures à 90° (perpendiculairement à un patient alité par exemple), ou si on choisit de se mettre à la tête du patient, il y a moyen de le préciser avant la prise des mesures ce qui entraîne une correction automatique de l’axe du cylindre.
  • Myopie instrumentale en mode manifeste : ceci est l’inconvénient commun à toutes les mesures sans cycloplégie par les réfracteurs automatiques. Les mesures se font de près, à une distance de 6 cm, et la cible est attractive (petit sapin de Noël sur gazon vert dans un ciel bleu). Cet aspect pourrait être amélioré si le constructeur avait décidé de choisir comme valeur représentative de la sphère non pas la médiane mais la valeur la plus positive (= celle où l’accommodation est la plus faible) en ayant soin auparavant d’avoir écarté les valeurs aberrantes.
  • Mesures aberrantes : l’appareil donne parfois des mesures tout à fait erronées, prises alors que de toute évidence l’œil ne fixe pas. Il faut également être attentif et rejeter ces mesures (c’est en général assez facile car ces valeurs sont incohérentes, mais il arrive que des mesures prises dans des conditions difficiles montrent par exemple un astigmatisme important et répété). Dans le doute, il vaut mieux recommencer l’examen.
  • Choix de la valeur représentative : le constructeur a choisi de prendre la médiane des mesures pour chaque composante réfractive. Ce n’est peut-être pas le meilleur choix. La plupart des autoréfractomètres sur table prennent la valeur médiane si elle existe dans les mesures effectuées pour les trois composantes réfractives à la fois. Si elle n’existe pas, ils choisissent alors la sphère la plus positive, le cylindre le plus petit en valeur absolue et l’axe qui lui correspond. Si ce choix était adopté par le constructeur du Rétinomax, il y aurait probablement moins de myopie instrumentale, de surévaluation du cylindre et d’axes aberrants.

Avantages du Rétinomax


  • Poids de l’appareil : il s’agit d’un appareil léger, pesant 1 kilogramme avec la batterie. Il est parfaitement transportable et prévu pour l’être car une valise fait partie des options d’achat. Le poids total de la station avec l’unité de mesure et l’imprimante est de 2,5 kg.
  • Fonctionne en lumière ambiante : Son utilisation ne demande pas une pièce où l’obscurité totale doit être faite. Il faut simplement opérer à l’abri des rayons solaires directs, et donc pas en face d’une fenêtre.
  • Diamètre pupillaire minimum requis : 2,5 mm ce qui est très peu contraignant (nous n’avons eu aucun cas de mesures impossibles suite à un diamètre pupillaire trop petit).
  • Gamme de mesures très étendue : les sphères sont mesurables dans un intervalle de -18 à +23 dioptries et les cylindres de -12 à +12 dioptries.
  • Prise rapide des mesures : il faut 0,12 seconde à l’appareil pour enregistrer une mesure. Dix secondes seulement sont nécessaires en mode Quick pour avoir 8 mesures à chaque œil évaluées et imprimées.
  • Résistance : nous n’avons eu aucune panne pendant 10 années d’utilisation. Il faut simplement veiller à la charge de la batterie et à la propreté des optiques (des traces de doigt peuvent fausser les mesures).
  • Simplicité d’utilisation : L’utilisation de l’appareil est très simple, praticable par un personnel non médical, au prix d’un apprentissage très court.
  • Cible attractive (sapin de Noël avec boules brillantes, ou petit ours sur une fusée dans un ciel bleu) : cette cible attire les enfants de deux ans par sa symbolique connue à cet âge. Chez les plus petits, c’est surtout par la couleur et la brillance qu’elle est attractive.

Le Sure-Sight


Ce réfractomètre automatique portable (de fabrication américaine, Welch Allyn) a été mis sur le marché en 1 999. Il détermine la réfraction à une distance de 35 cm, des signes auditifs permettant à l’examinateur de repérer la bonne distance. Sa gamme de mesures va de -5/+6 dioptries pour les sphères et 3 dioptries pour les cylindres. Il n’y a pas de spécification concernant le diamètre pupillaire minimum requis pour mesurer. Son poids est de 0,9 kg. L’instrument enregistre et moyenne 5 à 8 mesures par œil. Après chaque mesure, les résultats (sph, cyl, axe) sont affichés sur l’écran de l’instrument. Des lumières clignotantes visibles par le sujet examiné sont utilisées pour maintenir la fixation. Le temps d’acquisition des mesures va de 5 à 10 secondes pour les deux yeux. Le résultat imprimé n’indique qu’une mesure. Il n’y a pas d’explication sur le mode d’emploi concernant la manière dont cette mesure est extraite des 5 à 8 mesures, mais un chiffre de 1 à 9 se basant sur la variabilité des mesures du même œil indique la fiabilité de cette mesure imprimée. Pour être acceptable, la mesure imprimée doit avoir un chiffre de fiabilité supérieur à 5. Quand les valeurs réfractives d’un œil se situent au-delà de la gamme de mesures de l’appareil, le résultat imprimé est « -9.99  » sphère pour la myopie forte, « +9.99  » pour l’hypermétropie forte, ou « 9.99  » cylindre pour l’astigmatisme > 3  ∂. L’information concernant la technologie utilisée pour mesurer la réfraction est assez laconique dans le mode d’emploi. Cette technologie est basée sur l’analyse du front d’onde selon Hartmann-Shack, exploitant le principe de Scheiner de manière très sophistiquée. La lumière réfléchie par l’œil testé percute un senseur constitué d’un damier de microlentilles. Selon la réfraction de cet œil, un réseau de motifs lumineux se forme sur ces microlentilles et un algorithme permet de transposer cette information lumineuse en données réfractives.

Deux modes de mesures


  • Le mode adulte pour les mesures sous cycloplégie et pour les mesures manifestes chez les enfants au-delà de 6 ans.
  • Le mode enfant pour la réfraction manifeste chez les enfants de six ans ou moins. Dans ce mode, une valeur constante de +2,5  ∂ est ajoutée au résultat sphérique. Ce facteur de correction est supposé compenser la myopie de fixation induite par la focalisation sur l’instrument situé à 35 cm.

Les mesures « 9.99  » du Sure-Sight


Nous nous sommes attachés à vérifier sous cycloplégie les mesures manifestes « 9.99  » du Sure-Sight [4] :
  • Concernant la sphère, « 9.99  » indique en effet la présence d’une amétropie >-5/+6 ∂
  • Concernant le cylindre, dans 55  % des cas celui-ci était < 3  ∂ mais ≥ 1,5  ∂.

Comparaison Sure-Sight/Rétinomax


Nous avons mesuré la réfraction chez 98 enfants fréquentant de manière consécutive la consultation d’ophtalmologie avec les deux appareils en mode manifeste ([5]). L’examen de référence consiste chez les mêmes enfants en une 3e mesure manifeste et cycloplégique avec un réfractomètre standard (Topcon) lors de la même consultation. Toutes les mesures du Sure-Sight avaient un chiffre de fiabilité supérieur à 5. L’âge moyen des enfants était de 6,2 ans.

Agrément et dispersion des mesures en mode manifeste


Comme pour l’analyse des mesures réfractives au Rétinomax en mode Quick et Normal, nous avons mesuré l’agrément entre les différents appareils et la dispersion des mesures par rapport à l’examen de référence Topcon pour toutes les mesures en condition manifeste. Concernant le Sure-Sight, pour raffiner l’analyse, comme le mode enfant modifie le résultat sphérique, nous avons scindé les résultats sphériques de l’œil droit en deux groupes selon que la mesure avait été prise avec le mode enfant ou adulte et nous avons fait la même démarche statistique pour ces deux sous-groupes.
Cette étude montre qu’en mode manifeste, il existe une plus grande dispersion des mesures et donc une moindre précision dans la mesure des sphères avec le Sure-Sight comparativement au Rétinomax. Il existe par ailleurs un biais positif d’une dioptrie dans la mesure de la sphère entre le Sure-Sight et le Rétinomax, imposant une adaptation en conséquence des seuils d’anomalies en matière de dépistage réfractif. L’analyse scindée en mode enfant et adulte pour le Sure-Sight montre que c’est principalement le mode enfant qui augmente la dispersion des mesures et qui est responsable du biais. L’addition systématique arbitraire de 2,5 dioptries pour le mode enfant n’est donc pas une solution satisfaisante, chaque enfant accommodant de manière non prédictible (Schimitzek [8]).

Performances diagnostiques (référence cycloplégique)


En ce qui concerne les résultats, il y a lieu de différencier 2 objectifs, le diagnostic réfractif précis et le dépistage.
En ce qui concerne le dépistage réfractif, la cycloplégie est incontournable. Sur ce plan, le Rétinomax est apparu parfaitement compétitif par rapport à la skiascopie, connaissant néanmoins les réserves liées aux fortes amétropies et en particulier cylindriques. Par contre l’évaluation de l’axe reste obligatoirement plus précise avec le Rétinomax. Le seul vrai problème est donc celui de la faisabilité. Son appréciation reste délicate car elle est très dépendante de l’expérience de l’opérateur mais aussi de l’âge moyen des échantillons analysés. La seule certitude est que la pratique intensive de l’autoréfractométrie ne peut se passer d’une bonne formation de skiascopie.
En ce qui concerne le dépistage, la comparaison se recentre sur le Sure-Sight. Ce dernier à l’avantage de l’examen à distance mais ne résout pas le problème de la bonne fixation. Surtout les performances évaluées sur les critères de sensibilité et de spécificité sont nettement en faveur du Rétinomax sauf pour l’évaluation de la myopie (qui est peu fréquente aux âges concernés). En conséquence l’utilisation du Sure-Sight doit être strictement limitée au dépistage de masse.

La richesse des informations


Le Rétinomax permet de voir l’œil de l’enfant pendant l’examen et les différentes mesures successives affichées dans la caméra permettent de se rendre compte de la relaxation de l’accommodation au cours du temps, ce qui n’est pas possible avec le Sure-Sight. Les huit mesures affichées sur le résultat imprimé du Rétinomax sont plus informatives que la seule mesure extraite du Sure-Sight, pourvu que le personnel de dépistage soit suffisamment qualifié pour profiter de ces informations.

Conclusions


Ces deux réfractomètres portables sont capables de mesurer la réfraction manifeste dans le cadre d’un dépistage avec des chiffres acceptables de sensibilité et de spécificité. La détection de l’anisométropie est le point faible des deux appareils. Comme leur comparaison révèle la présence d’un biais lors de la mesure des sphères, principalement due au mode enfant du Sure-Sight, des critères de référence différents pour les anomalies sphériques doivent être choisis. Le Rétinomax possède des performances diagnostiques meilleures en ce qui concerne l’astigmatisme, l’hypermétropie et l’anisométropie. Le Sure-Sight est plus performant dans la détection de la myopie, qui est l’anomalie la moins fréquente dans la population d’âge préscolaire. La précision du Rétinomax est meilleure pour mesurer la sphère et égale au Sure-Sight pour la mesure du cylindre. Le Rétinomax est plus cher mais il apporte plus d’informations, encore faut-il que ces informations soient exploitables pour le personnel de dépistage. Les avantages du Sure-Sight sont sa plus longue distance par rapport à l’œil mesuré et le fait qu’il soit meilleur marché. Notre opinion est que le Sure-Sight est adéquat si le personnel de dépistage est peu qualifié, suite à sa simplicité d’emploi et sa distance par rapport à l’enfant. Par contre, si le dépistage est fait par des orthoptistes ou des optométristes (pays anglo-saxons), nous conseillons le Rétinomax pour la richesse de ces informations et ses meilleures performances dans la détection des amétropies en âge préscolaire.
Utilisé avec cycloplégie, le Rétinomax peut remplacer avec sûreté la rétinoscopie dans la grande majorité des examens mais n’exclut nullement le recours à cette dernière dans les cas difficiles ou de coopération insuffisante.
Références
  1. De Bideran M. Intérêt du réfractomètre portable chez l’enfant de 0 à 3 ans. Bull Soc Ophtalmol Fr. 1 998 ; 98 : 65-8.
  2. Cordonnier M, Dramaix M. Screening for abnormal levels of hyperopia in children : a non-cycloplegic method with a hand-held refractor. Br J Ophthalmol. 1 998 ; 82 : 1 260-64.
  3. Cordonnier M, Dramaix M, Kallay O, De Bideran M. How accurate is the hand-held refractor Retinomax in measuring cycloplegic refraction : A further evaluation. Strabismus. 1 998 ; 6 : 133-142.
  4. Cordonnier M, Kallay O. Non cycloplegic screening for refractive errors in children with the hand-held autorefractor Retinomax : Final results and comparison with non-cycloplegic photoscreening. Strabismus. 2 001 ; 9 : 59-70.
  5. Cordonnier M, De Maertelaere V. Comparison between two hand-held autorefractometers : the Sure-Sight and the Retinomax. Strabismus. 2 004 ; 12 : 261-74.
  6. Guyton DL : Automated clinical refraction. Duane’s Ophthalmology, Lippincott-Raven, Clinical volume I Chapter 67, 1 996.
  7. Rubin A, Harris WF. Refractive variation during autorefraction : Multivariate distribution of refractive status. Optom Vis Sci. 1 995 ; 72 : 403-410.
  8. Schimitzek T, Wesemann W : Clinical evaluation of refraction using a handheld wavefront autorefractor in young and adult patients. J Cataract Refract Surg. 2 002 ; 28 : 1 655-66.
  9. Wood MG, Mazow ML, Prager TC : Accuracy of the Nidek ARK-900 Objective Refractor in Comparison With Retinoscopy in Children Aged 3 to 18 Years. Am J Ophthalmol. 1 998 ; 126 : 100-108.
  10. Zadnik K, Mutti DO, Adams AJ. The repeatability of measurement of the ocular components. Invest Ophthalmol Vis Sci. 1 992 ; 33 : 2 325-33.

Date de création du contenu de la page : Juin 2010 / date de dernière révision : Décembre 2010