Réfraction de l'Enfant : Paramètres réfractifs Guy Clergeau

La réfraction


Sous le terme de réfraction on peut regrouper l’ensemble des situations optiques et fonctionnelles physiologiques et non physiologiques.
Les conditions dans lesquelles est mesurée la réfraction sont susceptibles d’influer très significativement sur les valeurs obtenues. En effet en fonction de l’utilisation ou non d’une cycloplégie, de la nature et de la durée de la cycloplégie, du port d’une éventuelle correction, de son exactitude et de sa durée ou de sa permanence, on est amené à constater qu’il existe au moins 3 descriptions possibles pour la réfraction objective :
  • La réfraction « manifeste  », décrite par les Anglo-Saxons, correspond à l’état de repos d’un œil non cycloplégié, sans sollicitation accommodative. Elle peut être obtenue soit de loin par une fixation à 6 mètres ou de près par la fixation de la fente lumineuse du skiascope ou d’un spot éblouissant, dont l’effet en pénombre serait anti-accommodatif. Le problème est qu’il est difficile d’affirmer que le tonus ciliaire de base est parfaitement déterminé.
  • La réfraction « cycloplégique  » classique obtenue ponctuellement avec un cycloplégique de référence, est censée supprimer le tonus ciliaire de base. En réalité, l’efficacité cycloplégique ne sera pas la même pour tous les sujets en particulier en fonction des perturbations accommodatives induites par l’amétropie initiale ou les troubles moteurs.
  • La réfraction « totale  » est pour sa part obtenue après libération de toute l’hypermétropie latente. C’est la seule valeur réfractive que l’on puisse considérer comme indiscutable et qui n’est généralement obtenue qu’après plusieurs années de correction optique totale permanente.
On constate donc qu’il existe une hiérarchie entre ces 3 situations. Celle-ci n’est toutefois qu’apparente puisqu’elle dépend avant tout des conditions d’examen :
  • La réfraction manifeste est certainement la plus proche de la réalité physiologique visuelle mais ceci ne reste vrai que lorsqu’il n’existe pas de pathologie accommodative.
  • Il y a par ailleurs lieu de relativiser la notion d’évolution de la réfraction en ce qui concerne la sphère et l’anisométropie sphérique. Que l’on considère ou non que la correction optique (surtout totale) puisse être responsable de la dérive réfractive, il est évident que l’on se trouve dans des conditions particulières et que le fait de mélanger en première intention les sujets strabiques et non strabiques, conduit à des biais statistiques qui sont totalement évidents dans certaines publications (Brown [3], Slataper [7]).
  • Dans l’objectif d’une étude de la réfraction, la réfraction cycloplégique standard semble la plus conforme. Malheureusement aucune étude ne semble pouvoir s’affranchir d’une interférence entre ces 3 situations puisqu’à la différence des situations physiologiques où seule la cycloplégie ponctuelle est généralement explorée (pas de correction), les situations pathologiques conduisent à une correction partielle ou totale avec cycloplégies diagnostiques itératives.

Les paramètres réfractifs


La description du système optique visuel nécessite systématiquement l’utilisation de 2 paramètres monoculaires, la sphère et le cylindre, et 1 paramètre bi-oculaire, l’anisométropie.

La sphère


La sphère et l’astigmatisme étant souvent combinés, il en résulte plusieurs termes pour la description sphérique :
  • La sphère la plus hypermétrope est qualifiée dans la littérature anglo-saxonne de sphère méridienne (« meridional  » = SM). Elle correspond à la sphère de base additionnée du cylindre exprimé de manière positive.
  • La sphère de base représente la sphère la moins hypermétrope (SB).
  • L’équivalent sphérique (ES) est égal à (SM + SB)/2.

Le cylindre


  • La puissance du cylindre peut être exprimée de façon positive ou négative. La littérature Européenne privilégie souvent l’expression positive (sauf en contactologie) et la littérature anglo-saxonne l’expression négative. Un tel choix ne comporte pas de base scientifique particulière. Le choix d’une description unique positive ou négative facilite surtout l’analyse statistique. Toutefois cette méthode apporte un biais descriptif dans la mesure où le critère de sphère la plus hypermétrope évoque en fait celui de paramètre le plus amétrope. Bien entendu cela n’est plus vrai lorsqu’il s’agit d’une réfraction myopique ou même mixte car sur le plan statistique c’est la valeur la plus éloignée de la moyenne de référence qui est la plus anormale, ce qui n’est pas obligatoirement la réalité en termes fonctionnels. Il s’en suit que l’équivalent sphérique est le paramètre le mieux décrit par la statistique gaussienne.
  • En ce qui concerne l’axe du cylindre, on constate dans la littérature 2 options de classification. La plus utilisée considère que les axes sont obliques pour les valeurs de 45° ±30 et 135° ±30. Plus rarement ce choix est de 45° ±15 et 135° ±15. Là encore il n’existe pas d’argument évident pour justifier ces critères, mais la définition de 30° en 30° nous paraît plus logique surtout si l’on tient compte de la difficulté à déterminer à moins de 10° près cet axe chez le tout jeune enfant.

L’anisométropie


Elle ne pose pas pour sa part de problème, le seul risque d’erreur étant de ne pas tenir compte de la symétrie en miroir des axes obliques et d’ignorer ou de créer des situations d’antimétropie.

Conclusion


La description la plus simple sur le plan sphérique semble être l’équivalent sphérique. Cette valeur n’est toutefois pas la plus représentative sur le plan fonctionnel, les difficultés potentielles de focalisation étant généralement liées au méridien le plus amétrope (page 239). De toute façon le paramètre sphérique n’a de signification que s’il est corrélé au paramètre cylindrique.
Lorsque sont combinées amétropie sphérique et amétropie cylindrique, le problème de la dénomination principale se pose. Les 2 valeurs à comparer sont alors l’équivalent sphérique et le cylindre. La valeur la plus importante définit le paramètre dominant.
D’autres modèles existent pour décrire la réfraction comme la méthode vectorielle. Mais si cette dernière est utilisée en chirurgie réfractive elle n’apparaît pas applicable sur le plan clinique.
Références
  1. Abrahamsson M, Fabian G, Sjöstrand J. A longitudinal study of a population based sample of astigmatic children : I. Refraction and amblyopia. Acta Ophthalmol (Copenh). 1 990 ; 68 : 428-34.
  2. Atkinson J, Braddick OJ, Bobier W & al. Two infant vision screening programmes : prediction and prevention of strabismus and amblyopia from photo-and-video refractive screening. Eye. 1 996 ; 10 : 189-98.
  3. Brown EVL. Net average yearly change in refraction of atropinized eyes from birth to beyond middle age. Arch Ophthalmol 1 938 ; 19 : 719-34.
  4. Clergeau G. Évolution des amétropies. In : A & J Péchereau, éditeurs. La réfraction. Cahiers de sensorio-motricité. Nantes : FNRO éditions ; 2 000, p. 57-63.
  5. Clergeau G. Épidémiologie des amétropies. Description et Évolution. In : La vision de l’enfant de la naissance à la lecture. Ed : AFPSSU Paris ; 2 001, p. 33-43.
  6. Ingram RM. Refraction as a basis for screening children for squint and amblyopia. Br J Ophthalmol. 1 977 ; 61 : 8-15.
  7. 7. Slataper FJ. Age norms of refraction and vision. Arch Ophthalmol. 1 950 ; 43 : 466-481.

Date de création du contenu de la page : Juin 2010 / date de dernière révision : Décembre 2010